Portrait
Lucie-Jeanne Champenois
Entre lumière instinctive, émotion brute et précision de la production, Lucie-Jeanne Champenois trace un parcours singulier à la croisée de la photographie et de la direction de projet. Photographe et productrice chez Citizen K, elle navigue entre création pure et organisation de l’ombre, avec une même exigence : donner du sens aux images.
À travers cet entretien, elle nous ouvre les portes de son univers, de ses méthodes, de ses doutes aussi, et de cette énergie si particulière qui fait la magie d’un shooting quand tout s’aligne. De la lumière à l’intention, du chaos à la fierté collective, Lucie-Jeanne nous raconte son métier avec une grande sincérité — et beaucoup de sensibilité.
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Lucie-Jeanne, je suis photographe et productrice chez Citizen K, et photographe depuis cinq ans.
Je travaille surtout en noir et blanc, avec un univers très instinctif, très sensible, qui mélange la mode, le portrait et la lumière.
Dans mon travail, il y a toujours un équilibre entre la création et la production :
la création, c’est l’émotion et l’image ;
la production, c’est l’organisation et la vision globale.
Les deux se complètent vraiment.
Je me vois un peu comme une directrice artistique hybride : je pense en images, je ressens beaucoup, et j’aime structurer tout ça pour créer des projets mode qui soient à la fois beaux, précis et sensibles.

Quand tu arrives sur un shoot,
qu’est-ce que tu regardes en premier
pour sentir si la journée
va être smooth ou chaotique ?
La première chose que je regarde, c’est le lieu. L’énergie, la lumière, comment on va circuler dans l’espace, ce qu’il raconte et comment on va pouvoir y installer notre vision.
J’ai besoin de sentir que je peux m’y ancrer.
Ensuite je fais le tour de l’équipe : voir si tout le monde est arrivé, dans quelle énergie chacun est, si la dynamique semble fluide.
Et évidemment, je checke le matériel : est-ce que tout est là, est-ce qu’on est prêts techniquement, est-ce que l’on peut dérouler sereinement ?
Dans les deux cas — en tant que photographe ou productrice — j’ai besoin de me sentir en confiance. Et ça commence vraiment par ces premières minutes.
Le shoot qui t’a le plus marqué
depuis que tu bosses dans la prod ?
Ceux qui me marquent le plus sont les shootings où je sens que tout s’aligne. Quand ce que tu as construit en amont, parfois pendant des semaines, se met à vivre sous tes yeux, et que la magie opère.
Il y a une vraie émotion dans le fait de voir une équipe entière respirer la même intention, et créer quelque chose qui dépasse même ton idée de départ.
La pire chose qui te soit arrivée,
et la meilleure ?
Je n’ai jamais vécu de gros chaos (dieu merci!) j’anticipe beaucoup pour éviter ça, mais je pense à une journée où la collection stylisme est arrivée très en retard. On a dû réorganiser tout le déroulé sur place : les looks, les transitions, le timing.
C’était un moment où je devais à la fois garder mon calme (et intérieurement je ne l’étais pas du tout) , rassurer l’équipe et trouver des solutions rapidement.
Finalement, ça s’est très bien passé, mais c’est typiquement le genre de situation où la production te rappelle que tu dois être solide sur tes appuis…
La meilleure, c’est toujours la même chose : la fierté collective !
Quand le shooting se termine et que tout le monde est heureux, que l’énergie est belle, que les images sont là… Ce sont des moments tellement forts. Tu rentres chez toi avec cette sensation d’avoir vécu quelque chose d’unique.
Le shoot dont tu es
la plus fière ?
Mon dernier shooting pour une marque de bijoux, où j’ai fait la direction artistique, la production et la photo, a été un moment vraiment important pour moi.
Pour ce projet, j’ai eu envie de faire appel à des copains avec qui j’avais travaillé dans mes anciens jobs. On ne s’était pas retrouvés sur un set depuis longtemps, et il y avait quelque chose de très doux et très naturel dans le fait de créer à nouveau ensemble. L’énergie était simple, chaleureuse, évidente.
Et puis, je n’avais pas photographié depuis un moment. Reprendre l’appareil, retrouver le geste, la lumière… ça m’a vraiment fait du bien.
Ça m’a redonné confiance, ça m’a rappelé pourquoi j’aime autant ce métier. J’ai adoré ce shooting, vraiment.
Et le résultat me ressemble beaucoup : dans l’esthétique, dans la lumière, dans les intentions. C’est un projet qui a compté pour moi, autant humainement qu’artistiquement.
Le meilleur conseil qu’on t’ait donné,
et que tu appliques encore aujourd’hui ?
Sur un shooting, tout peut bouger. Mais si ton intention est claire, tu restes droite, tu ne te perds pas. C’est un conseil très simple, mais très puissant, et je m’y raccroche souvent.
En tant que productrice et photographe,
est-ce que ce n’est pas frustrant parfois de produire
des shootings de mode sans être derrière l’appareil ?
Oui, parfois c’est frustrant !
Quand j’arrive sur certaines productions, les sets sont tellement beaux, la lumière est incroyable, les mannequins, le stylisme… tout est tellement inspirant que j’ai envie d’être derrière l’appareil et de profiter du setup.
Mais en même temps, c’est super de pouvoir produire ces shootings-là. De créer ce terrain d’expression pour d’autres artistes. C’est une autre forme de création, plus invisible, mais tout aussi forte.
Actualités
Je prépare une exposition pour janvier, au Studio Photo La Brique Rouge, où je vais dévoiler une nouvelle série très personnelle.
Et je développe en parallèle un projet autour d’un puzzle-tableau, une œuvre introspective qui m’a aidée à traverser une grande année de transition. C’est un projet très symbolique, qui parle de reconstruction, de lumière et de renaissance. — et qui va clairement poser les bases de mes projets de 2026.






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